Récemment une jeune femme, Shanley, a été mise en lumière pour sa lutte contre le revenge porn ! L'équipe Grunge News revient donc aujourd'hui sur le sujet en vous apportant davantage d'explications sur comment lutter, que faire si cela vous arrive,... avec Elena, militante au côté de Shanley.
Grunge News : Bonjour, pourriez-vous vous présenter ?
Elena : Bonjour, je m’appelle Elena, j’ai 20 ans. Je suis actuellement étudiante en BTS Négociation et digitalisation de la relation commerciale, et depuis des semaines je suis militante contre le revenge porn.
Grunge News : Pouvez-vous définir le terme de « Fisha » ?
Elena : On définit le terme « fisha » du verlan afficher, donc afficher des photos compromettantes sur les réseaux aux yeux de tous.
Grunge News : Qu’est-ce que le « Revenge Porn » ?
Elena : Le « revenge porn » c’est lorsque l’on partage un contenu sexuellement explicite en public sans le consentement de la personne dans le but d’une sorte de « vengeance ».
Grunge News : Par quel terme(s) définiriez-vous ces actes ?
Elena : On peut qualifier ces actes de dangereux, répugnants, et ridicules issus d’une frustration des auteurs.
Grunge News : Vous êtes associées à la lanceuse d’alerte Shanley, combien êtes-vous à travailler sur cette lutte contre le « Revenge porn » ?
Elena : Nous sommes environ une dizaine de filles à lutter.
Grunge News : Quel est votre mode opératoire pour endiguer au mieux les comptes de « Fisha » ?
Elena : Pour endiguer au mieux les comptes, nous effectuons des « raids » de signalement, nous signalons les comptes directement sur les plateformes mais également sur Pharos (brigade numérique) et sur Net Ecoute.
Grunge News : Y-a-t-il des hommes qui participent à vos actions de lutte ?
Elena : Dans notre collectif il n’y a pas d’hommes, mais nous en avons qui nous aident au quotidien et qui nous ont proposé leur aide pour les signalements des comptes.
Grunge News : Quel est le profil d’un créateur de compte(s) « Fisha » ?
Elena : Il n’y a pas vraiment de profil-type pour être un créateur de ce type de comptes. La plupart sont des hommes, mais on peut également retrouver des femmes. Souvent le désir de créer un compte fisha émane d’un sentiment de haine ou d’un désir de vengeance.
Grunge News : Comment les créateurs de comptes « Fisha » parviennent à avoir ces nudes ?
Elena : La plupart du temps, les créateurs de comptes demandent des vidéos/photos à ceux qui regardent les storys. Il n’y a pas seulement des nudes , on retrouve également des tortures, des scènes de viol…
Grunge News : Il est possible que les créateurs de compte « Fisha » après qu’un de leur compte ai été supprimé, il recommence sous un autre pseudonyme, comment y remédier ?
Elena : Oui, nous avons souvent eu à faire avec certains créateurs qui ne veulent pas lâcher l’affaire en créant des comptes de secours et/ou en passant sous un autre nom. Nous surveillons, mais heureusement nous avons aussi des personnes renseignées qui nous donnent les noms de ces comptes, pour que nous puissions continuer de les faire sauter.
Grunge News : A l’heure d’aujourd’hui depuis que vous êtes militante, combien de comptes ont fermé, combien ont (ré)ouvert et combien de personnes ont été arrêtées ?
Elena : Nous avons fait fermer environ 200 comptes. Nous avons connaissance de plus d’une centaine de comptes encore actifs à ce jour, et malheureusement personne n’à encore été arrêtée à ce jour.
Grunge News : Être diffuseur de ce type de contenu peut porter préjudice, pouvez-vous rappeler les peines encourues ?
Elena : Les peines encourues sont actuellement de 60 000 euros d’amendes et deux ans d’emprisonnement.
Grunge News : Récemment une jeune fille s’est suicidée à la suite d’avoir été victime de « Revenge Porn » sur les réseaux sociaux, que faire si mes nudes ont déjà été diffusée ?
Elena : En tant que victime, il ne faut surtout pas hésiter à prendre des captures d'écrans pour garder des preuves et déposer plainte. Vous pouvez également nous contacter sur : jenesuispasseule@protonmail.com mais aussi sur nos réseaux sociaux Instagram (stop.fisha) et twitter (FishaStop). Nous accompagnons les victimes et leur expliquons comment faire, on peut également leurs apporter un soutien moral.
Grunge News : N’y a-t-il pas de modérateurs chez Snapchat et Telegram (qui seraient les réseaux sociaux où le plus de contenus du genre s’y trouveraient) qui devraient déjà effectuer le travail courageux et solidaire que vous effectuez ?
Elena : Si, normalement il y a des personnes qui sont censées s’en occuper, mais ces plateformes n’agissent pas. Avec le confinement on remarque également que les signalements sont beaucoup plus longs à être traités. Comment expliquer que des comptes ou canaux soient encore ouverts après des semaines, avec les milliers de signalements à leurs sujets par jour ? Nous pensons également que les plateformes ferment volontairement les yeux sur le phénomène.
Grunge News : Des hommes aussi sont affichés, ils sont en moins grands nombres certes, mais luttez-vous aussi contre ces comptes-là ?
Elena : Nous luttons pour tout le monde, hommes comme femmes, nous recevons des témoignages d’hommes qui ont été affichés de la même façon et avons fait le nécessaire pour eux. Nous sommes tous concernés, et devons être solidaire face à ce phénomène.
Grunge News : Selon vous, pourquoi les hommes sont moins victimes de « Revenge Porn » que les femmes ?
Elena : Les femmes sont sûrement plus victimes que les hommes car le corps féminin a toujours été très sexualisé. Aussi pour les créateurs des comptes, il n’est pas normal pour une femme de montrer son corps, ou d’afficher le fait qu’elle entretienne des relations sexuelles, il est donc de leur « devoir » de détruire la réputation d’une femme jusqu’à la pousser parfois, au suicide.
Grunge News : Lorsque l’on est militant(e) d’une cause comme la vôtre, est-on nécessairement féministe ?
Elena : Oui et non, même si la divulgation d’information à titre privé n’a à priori pas de frontière entre hommes/femmes, si les comptes fishas existe, c’est en partie à cause du sexisme revendiqué par les créateurs de ce type de compte.
Grunge News : Faudrait-il en venir jusqu’au point où nous ne devrions plus s’envoyer de nudes ?
Elena : Nous ne pouvons pas empêcher une personne de partager ses nudes et d’avoir une vie privée. Je pense surtout qu’il faut se méfier et ne pas envoyer des choses que l'on pourrait regretter plus tard si elles étaient diffusées. Il faut surtout être renseigné sur la personne en face de nous, ne pas faire ça avec n’importe qui, pour pouvoir directement attaquer en justice si la personne diffuse malgré tout. Je pense que l’on devrait plus sensibiliser les jeunes, car même si on dit de se méfier des réseaux sociaux, certains ne comprennent pas pourquoi, ou le prennent à la légère.
Grunge News : Le confinement a fait proliférer le nombre de comptes de « Revenge Porn », quel est votre explication à cela ?
Elena : Ce type de comptes existent depuis longtemps, mais c’était un phénomène assez peu populaire. Le confinement joue beaucoup, c’est probablement un moyen d’occuper l’ennui pour eux.
Grunge News : Cette lutte va-t-elle continuer de manière aussi importante après le confinement que pendant ?
Elena : Nous continuerons de lutter et de faire pression sur les réseaux sociaux jusqu’à ce qu’ils décident de s’arrêter et de lâcher l’affaire !
Grunge News : Est-ce que cette lutte se finira un jour ou le combat ne pourra pas cesser ?
Elena : C’est un combat que nous allons devoir mener sur le long terme, jusqu’à ce que ce phénomène se calme, mais tant que les réseaux seront présents, il sera difficile de l’arrêter complètement.
Grunge News : Pouvez-vous nous décrire une journée type d’une militante comme vous ?
Elena : Nous nous sommes regroupés en groupe afin de délocaliser le travail et de se focaliser exclusivement sur une affaire par groupe. Par exemple, je m’occupe des réseaux sociaux, ma journée se résume à répondre aux messages, alimenter les réseaux; j’effectue bien évidemment des signalements à côté.
Grunge News : Si nous aussi voulons luttez, comment faire ? Peut-on rejoindre votre équipe ? Si oui, comment ?
Elena : Vous pouvez nous rejoindre sur nos réseaux :
Instagram – stop.fisha
Twitter - @FishaStop
Vous pouvez nous aider en signalant les comptes, en nous envoyant des captures d'écrans de ce que vous voyez, en faisant vos signalements vous-même de votre côté sur la plateforme concernée mais également sur Pharos et Net Ecoute ! La honte doit changer de camp !
- Merci Elena de votre collaboration, l'équipe Grunge News ! -
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